La movida Zadig suscite un débat éveillé au sein de notre communauté de travail et spécialement au sein des ACF. Un analyste doit-il vouloir s’ingérer dans la politique, prendre position, s’investir au-delà de la clinique, ou bien doit-il rester confiné dans son bureau ? ça parle, ça discute, c’est vivant.
Une ACF ne se résume à une liste d’activités d’étude ou de promotion de la psychanalyse dans la Cité. Elle la particularité de s’intéresser au mode d’engagement de ses membres pour la psychanalyse, à la façon dont le membre est pris par ses « tripes » dans la cause analytique. C’est dire que l’ACF ne nie pas le fait que ce sont des corps parlants qui porte cette cause. Sous les statuts de l’ACF, en deçà de son programme, derrière son « études », il y a une présence sous jacente d’un réel des corps. Nous ne nous étonnons donc pas quand il y a une certaine intranquillité, quand ça s’agite, quand on n’est pas d’accord, quand on est divisés, quand les énonciations les plus singulières viennent s’affronter. Car pour converser, il ne s’agit pas d’être d’accord les uns avec les autres. On ne voit d’ailleurs pas très bien l’utilité d’une conversation qui consiste à répéter encore et encore un point de consensus entre les interlocuteurs. Une opinion commune à tous les membres d’un collectif est une exigence à laquelle doivent se soumettre les membres d’un parti politique ou d’une foule constituant une armée. Cette exigence est antinomique à une communauté de travail psychanalytique, à condition bien sûr que la conversation se poursuive, malgré les désaccords.
Comme dans la clinique, il nous semble que c’est avec cette distance qu’il faille lire les moments de crises où les désaccords se cristallisent. Quand l’objet est proche, quand l’enjeu est réel, le sujet appelle davantage aux signifiants d’identification qui le définissent dans son rapport à l’Autre. La mise en tension des ces signifiants les uns par rapport à l’autre, voire les uns contre les autres, ne doit pas nous paniquer, pourvu que nous ne n’abandonnions jamais l’idée que le réel est au-delà de toutes ces identifications, et que notre vrai combat est avec « l’ange de la débilité humaine »[1], celui qui ne cesse de ne rien vouloir savoir de ce réel.
[1] Jacques-Alain Miller, “La « common decency » de l’ Oumma”, LQ, n° 474.