Dans le cadre d’une après-midi sur la passe organisée par l’ACF-Belgique, trois AE de l’Ecole de la Cause freudienne – Laurent Dupont, Dominique Holvoet et Daniel Pasqualin – et un ex-analyste de l’école – Bernard Seynhaeve –, ont été invités à prendre la parole à partir de ce que Jacques Lacan désigne dans le Séminaire XX comme « la part femme des êtres parlants » (1).
Écartant toute définition s’appuyant sur une distinction anatomique ou essentialiste, Lacan avance que la part dite femme et la part dite homme traduisent deux positions distinctes pour ce qu’il en est du rapport au désir et à la jouissance chez le parlêtre.
Du côté homme, cette position est subordonnée pour tous à la fonction symbolique et universelle du phallus, signifiant du désir et de la castration. Du côté femme, elle se caractérise par le fait qu’« elle a, par rapport à ce que désigne de jouissance la fonction phallique, une jouissance supplémentaire »(2), indiquant par là qu’une partie de sa jouissance échappe au signifiant et qu’il n’est par conséquent pas possible de La dire toute.
Durant cette après-midi, quatre hommes ont toutefois essayé de s’emparer de la question et d’approcher cet impossible à dire à partir de ce que leur analyse respective leur a enseigné, singulièrement.
Chacun d’entre eux a d’abord témoigné du fait qu’appréhender cette part femme implique une traversée. Cette traversée, c’est celle du fantasme de virilité et d’universalité et des fictions qu’il dessine. En faisant apparaître la dimension de semblant de ces fictions, l’analyse leur a ainsi permis de se délester de ce qui de la jouissance liée à la fonction phallique les a pendant longtemps encombrés.
Par la suite, ces témoignages ont laissé entendre que lorsque les fictions chutent et laissent place au manque, ce qui reste c’est le corps et l’éprouvé singulier de la façon dont celui-ci est affecté par la langue. Ainsi, l’Analyste de l’École est celui qui, en acceptant de faire avec ce manque et malgré ce qui l’a encombré au titre d’une position phallique, a éprouvé l’idée qu’il existe une jouissance Autre. De cette jouissance, s’il ne peut rien en savoir, il peut néanmoins nous témoigner du fait qu’elle s’éprouve. Ce n’est pas rien.
Interroger cette part femme, ce serait ainsi interroger le rapport propre à chaque parlêtre avec cette jouissance et la façon dont il invente un mode d’écriture de cette trace à jamais inscrite sur le corps.
Pour terminer, chacun d’entre eux a tenté d’indiquer en quoi « Dire oui au féminin »(3) peut influer sur la pratique de l’analyste. En s’orientant de son expérience d’un trajet allant de l’universel lié au fantasme à une manière à nul autre pareil de faire avec la jouissance inscrite sur le corps, l’analyste, délesté de toute attente et tout idéal universalisant, s’attelle à faire résonner par la coupure ce qui chez l’analysant touche au plus singulier.
1 J. Lacan, Le Séminaire, Livre XX (1972-1973), Encore, Paris, Le Seuil, p. 74.
2 Ibid, p. 68.
3 L. Dupont., « Au-delà du fantasme, l’outrepasse », La cause du désir, n°95, avril 2017, p.148.