Éditorial : Un gain de formation au CPCT-Paris
Les deux années de stage au CPCT-Paris étant arrivées à leur terme, un certain nombre de praticiens sortants ont souhaité témoigner des effets de formation qu’ils ont pu en extraire.
Lors de son « Ouverture » à la dernière journée du CPCT-Paris, la présidente du CPCT-Paris, Lilia Mahjoub, soulignait la remarque de Lacan selon laquelle : être rigoureux ce n’est pas vouloir absolument que les petites chevilles rentrent dans les petits trous[1]. Quand cela résiste, ajoute-elle, « ceci indique qu’il y a un réel en jeu et que celui-ci ne peut se saisir avec ce que l’on sait déjà »[2].
Lisons alors, dans ce numéro de L’Hebdo-Blog, ce qui relève d’un savoir nouveau obtenu par ces praticiens qui ont fait l’expérience de la clinique du traitement bref. Répondre sans savoir comment, comme le soulignait une praticienne, pourrait en être le principe.
Par contre, ce que le praticien sait par l’expérience de sa propre analyse, c’est qu'il s’agit d’opérer avec la parole, non pas dans le sens de boucher les « petits trous » avec les « petites chevilles » des règles techniques, applicable à tous, mais dans le sens d’agir afin de produire une rencontre avec « ce qui opère »[3], à savoir le désir de l’analyste et obtenir un effet de sujet, ce qui est toujours singulier.
Certes, il ne s’agit pas de faire des cures psychanalytiques au CPCT, mais il y a une exigence de rigueur quant au désir que le praticien est appelé à mettre en jeu qui, ne visant pas la guérison, permet d’éloigner le traitement bref d’une psychothérapie. Précisons avec Lacan qu’« Il s’agit bien d’une rigueur en quelque sorte éthique, hors de laquelle toute cure, même fourrée de connaissances psychanalytiques, ne saurait être que psychothérapie. »[4]
« Une pratique n’a pas besoin d’être éclairée pour opérer »[5], dit Lacan. En effet, mais ses remarques sur la charité sont également à prendre en compte dans un lieu comme le CPCT où le traitement est gratuit[6]. Le praticien qui éclaire sa pratique ne jouit pas de faire du bénévolat, le bien de l’autre, car c’est à partir de son désir qu’il va en extraire un savoir.
Les auteurs de ces textes témoignent de leur position décidée de ce point de vue. Grâce au travail casuistique interne du CPCT-Paris, au contrôle, et à l’analyse, ces praticiens ont essayé de saisir, au-delà de tout effet thérapeutique, ce que leur désir a pu avoir comme lien avec le discours analytique pendant ce temps court au CPCT-Paris et en tirer un gain de formation.
[1] Cf. Lacan J., Le Séminaire, livre X, L’Angoisse, texte établi par J.-A. Miller, Paris, Seuil, 2004, p. 23-24.
[2] Mahjoub L., « Ouverture », intervention lors de la journée du CPCT-Paris : « Que savent les enfants ? Questions et réponses au CPCT », le 28 septembre 2019, inédit.
[3] Collectif, Ce qui opère. Au CPCT-Paris, Paris, École de la Cause freudienne / Huysmans, 2015.
[4] Lacan J., « Variantes de la cure-type », Écrits, Paris, Seuil, 1966, p. 324.
[5] Lacan J., « Télévision », Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p. 513.
[6] Voir l’argument de Lilia Mahjoub : « Ouverture », Ce qui opère, op. cit., p. 12.
Lire la suite