Dans cinq mois nous serons à Rio, là où Marcus André Vieira, directeur du congrès de l’AMP 2016, nous promet que nous serons « initiés à une façon brésilienne de vivre la psychanalyse et l’enseignement de Lacan ! »[2]. L’ombre qui a recouvert Paris en ce mois de novembre dernier était « couleur de cataclysme, d’orages et de cuivre »[3], comme l’a écrit Mireille Havet dans son Journal le mardi 11 octobre 1921. Aujourd’hui, nous apprenons à faire avec cette ombre et c’est le désir qui nous porte et nous pousse à ne pas fléchir mais, au contraire, à poursuivre dans notre engagement pour la cause analytique. Le congrès de l’AMP à Rio s’annonce comme un tourbillon de concepts nouveaux pour notre communauté de travail. Déjà le 17 avril 2014 à Paris, Jacques-Alain Miller, dans sa conférence de clôture du précédent congrès, nous l’avait annoncé : Rio sera le lieu où s’élaborera la psychanalyse du XXIe siècle. L’enjeu est capital. Il s’agit, en effet, de repenser les concepts du dernier enseignement de Lacan à la lumière de la pratique analytique d’aujourd’hui. J.-A. Miller le dit très précisément : « La psychanalyse change, ce n’est pas un désir, c’est un fait ».[4]
Cette conférence est notre boussole. C’est ligne à ligne que nous avons appris à la lire et à la travailler. Des modifications sont intervenues dans la société qui mettent en lumière les changements dans la sexualité avec la diffusion, à grande échelle, de la pornographie. Face à cette clinique, nous avons à reprendre les concepts classiques de la psychanalyse avec les différents statuts du corps, de l’inconscient, du symptôme et de la sublimation à partir du dernier enseignement de Lacan. Cette conférence nous bouscule, nous interpelle, tant elle donne la mesure de cette urgence à avancer pour nous tenir à la hauteur des changements déjà en cours.
Pour la préparation du congrès des travaux et des publications sont parus ; ce sont des outils précieux pour nous aider à opérer ce changement de perspective. Ils foisonnent : Scilicet, Papers, textes d’orientation, Skabô, Pièces détachées du site de l’AMP, etc. Ils témoignent de l’ardeur et de l’implication de chacun pour répondre à la question de Lacan à la fin de son « Allocution sur les psychoses de l’enfant » quand il dit : « quelle joie trouvons-nous dans ce qui fait notre travail ? »[5] Voilà ce qui nous porte à nous engager d’un pas plus assuré vers ces « voies inédites » qu’évoque J.-A. Miller. Ces écrits seront donc notre viatique pour nous rendre au congrès de l’AMP. Cependant, il y a un au-delà de la lecture des textes et de la préparation du congrès, qui ne sont que les prémices de l’événement attendu ; cet au-delà passe par la présence « en-corps » des analystes sur le lieu du congrès. De cette rencontre dans le bruissement des langues, un work in progress est attendu.
« Le corps parlant – L’inconscient au XXIe siècle » s’entend déjà comme une invitation au voyage au pays sans frontières du corps du parlêtre, du sinthome et de l’escabeau[6]. Le corps parlant c’est un mystère, une opacité, écrit Clotilde Leguil dans son éditorial de « Biblioparlant ». Elle précise que : « Le continent noir de Freud fut la féminité. Le continent noir lacanien serait celui du corps parlant »[7]. Voilà une perspective qui s’inscrit dans le XXIe siècle comme du nouveau ! Nous aurons à découvrir ce nouveau continent noir lors de ce rendez-vous qui scande, tous les deux ans, le travail de notre communauté analytique. Un rendez-vous à ne pas manquer !
[1] Miller J.-A., « L’inconscient et le corps parlant » – Présentation du thème du Xe congrès de l’AMP à Rio en 2016, Scilicet, Paris, coll. Rue Huysmans, p. 22.
[2] Vieira M. A., « vers Rio », Interview de Marcus André Vieira par Patricia Bosquin-Caroz, disponible sur le site de l’AMP, www.wapol.org/fr/
[3] Havet M., « extrait du journal inédit », Élucidation 8/9, Paris, Verdier, hiver 2003-2004, p. 59.
[4] Miller J.-A., « L’inconscient et le corps parlant », op. cit., p. 22.
[5] Lacan J., « Allocution sur les psychoses de l’enfant », Autres Écrits, Paris, Seuil, 2001, p. 369.
[6] Miller J.-A., « L’inconscient et le corps parlant », op. cit., p. 21-34.
[7] Leguil C., éditorial, « Biblioparlant », disponible sur le site de l’AMP : www.wapol.org/fr/